Le Vice-Chancelier monta à la tribune.
Mesdames et messieurs,
Monsieur le Député Ralaivao,
Avant d'entrer dans le vif du sujet, je vous prie de me croire que je déplore la situation actuelle et que je souhaite tout autant que vous qu'elle se termine par une désescalade du conflit.
Commençons d'abord par la virulence que votre camp me reproche.
Il est vrai que nous avons opté pour une certaine fermeté et ce choix est totalement réfléchi et assumé. L'action consistant à faire sécession de son propre gouvernement relève d'un cas de haute-trahison passible de perpétuité incompressible et d'une amende de 15 000% des revenus du condamnés.
L'article 1 de la Constitution dit de manière explicite que la Fédération de Frôce est indivisible. Donc non seulement nous sommes dans un cas de haute trahison, mais en plus la Constitution fait l'objet d'une violation sans précédent.
Avec le Chancelier Suprême nous avions deux choix.
Le premier consistait à se montrer ferme, refuser d'accorder la moindre légitimité à un mouvement déclenché par le maire d'une grande ville qui n'a même pas une seule entrée au palais provincial de Farellia. Se montrer ferme consistait à appliquer la loi et défendre les institutions qui sont la mission que je partage avec le Chancelier en tant que ministre fédéral de la Justice, du Renseignement et des Institutions. La plainte pour haute trahison ne tombe pas du ciel car Monsieur Velasco Pérez savait parfaitement à quoi il s'exposait en faisant sa déclaration illégale.
Quel gouvernement solide sur ses fondations accepterait une telle sédition ?
Aucun, et je vous prie de me croire que nous sommes ici loin d'un débat entre les démocrates et les non-démocrates. La question ici c'est ceux qui sont fidèles aux lois de notre pays et ceux qui les violent allégrement en dressant une partie de la population contre la majorité qui soutient le régime actuel.
Le Chancelier et moi ne pouvions donc nous dérober et opter pour le choix inverse car qu'aurait-on dit de nous si nous avions décidé de traiter d'égal à égal avec ces gens ? Qui aurait accepté de voir le gouvernement fédéral vendre son âme, son autorité et sa légitimité au diable pour acheter la paix sociale ?
Les méthodes employées par le camp républicain qui dresse des foules contre son propre gouvernement relèvent de méthodes populistes et il s'agit là d'un jeu dangereux.
Le Gouvernement sera toujours disposé à faire preuve de clémence en cas de retour à la légalité mais face à ceux qui s'entêtent, mettent nos institutions en danger, nous resteront fermes et remplirons donc la mission qui nous incombe. Notre réponse sera toujours proportionnelle à l'intensité des attaques contre nos institutions.
Ceux qui soutiennent ouvertement une personne qui se rend coupable de haute-trahison se rendent eux-même coupable de trahison. Nous demandons donc à chacun de réfléchir à la portée de ses actes car personne au gouvernement fédéral ne souhaite voir les poursuites s'accumuler. Je dis bien personne car chaque défection d'un élu est une tragédie pour notre démocratie et nos institutions.
Julien se tourna vers Louis Ralaivao, avec qui il avait défendu ardemment la cause autonomiste Antsiranaise dans le passé. Il relâcha son ton et adopta une attitude d'apaisement.
M. le député Ralaivao, en menaçant d'entraîner Antsiranana dans cette voie sans issue vous jouez un jeu dangereux. Cette province est bien agité par son histoire complexe, n'allez pas l'entraîner dans une aventure hasardeuse qui ne ferait que lui apporter désordre et instabilité.
N'oubliez pas que pour la première fois une majorité autonomiste a été élue mais aussi que nous comptons bel et bien discuter pour permettre à votre province d'obtenir la délégation de compétences qu'elle attend depuis des années. Les planètes sont alignées pour une telle évolution, je tiens à vous le rappeler.
Ne gâchez pas cette opportunité historique en dressant de nouveau la province contre l’État fédéral, ce serait sources de dommages irréparables pour Antsiranana. Vous savez comme moi que je porte cette province dans mon cœur et que je serais toujours parmi les premiers à être à l'écoute des demandes Antsiranaises.
Pour le bien de votre province, je vous demande donc de ne pas emprunter la voie séditieuse que certains ont choisi.
Ma mission consiste à assurer la continuité de l'ordre public et je me tiendrai à cette mission dans les cadres définies avec la Chancellerie Suprême. Ne croyez pas que je prend du plaisir à déposer plainte car j'aurais préféré que la dialogue soit amorcé en amont avant que l'irréparable ne soit commis.
Le Gouvernement fédéral n'est l'ennemi de personne, ne cherche à réprimer personne car nous vous en déplaise nous sommes toujours en démocratie et quand une minorité illégitime menace de prendre le pouvoir par l'illégalité, il est du devoir de la démocratie de se défendre, fut-ce par des moyens radicaux mais toujours dans le respect des procédures juridiques et constitutionnelles.
Je demande donc de manière solennelle la fin de cette escalade insensée qui ne peut que se terminer par des drames humains et une intervention de la Justice et des Juges de la Cour Suprême qui verront que si la situation se met à pourrir, alors les institutions seront en danger et devront être défendues.
Le ton du Vice-Chancelier devint soudainement plus martial tandis qu'il balayait du regard l'Assemblée.
J'en appelle à chaque député que vous êtes d'oublier vos divergences d'idée un moment et de tous vous unir pour défendre l'ordre institutionnel. Le moment que nous vivons n'a rien d'une récréation, ce sont nos institutions qui sont en jeu, l'Empire qui est en jeu !
Unissons-nous pour rétablir l'ordre et garantir la stabilité de ce pays !
Vive la Frôce !
Le Vice-Chancelier descendit de la tribune, dépité intérieurement par la situation et effrayé par son obligation d'être la main de fer du gouvernement fédéral...