Débat 7 FCF - PAS - ADF : Quels objectifs doit avoir la fonction publique ?

[Riccardo Finacci Núñez]

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N'oubliez pas que vous n'avez que 3 interventions par parti et par débat le temps de cette campagne.
Par conséquent le temps de réponse passe à 48 heures.

[Jean Bournay]

FCF - (1/3)

J'aimerais avant toute chose, remercier celles et ceux qui ont mis en place ce débat, ainsi que mes adversaires venu défendre leurs idées.

Les miennes, vous les connaissez et je suis pour une fonction publique forte. De manière générale, la fonction publique doit avoir pour objectif suprême d'être le rempart social contre le capitalisme sauvage. Dans la lutte de l'Etat contre le Capital, il me semble essentiel que c'est à la fonction publique, d'être le bras solidaire de l'Etat.

En ce sens, la fonction publique doit mettre à disposition des citoyens et citoyennes les outils pour une vie décente. C'est elle qui a pour objectif d'éduquer la jeunesse qu'elle que soit le revenu des parents, c'est elle qui a pour objectif de soigner jusqu'aux sans-le-sou, c'est elle qui doit donner aux pauvres de quoi manger, c'est elle qui doit donner un toit aux sans abris, c'est elle qui doit rendre la justice à tous, c'est elle qui doit veiller la nuit pour que le reste dorme sur ses deux oreilles.

La fonction publique doit avoir cet objectif d'être la grande soeur attentive de la population, comme l'Etat devrait être le grand frère attentif.

Concrètement, la fonction publique doit être un pilier fondamental de nos valeurs face au consumérisme, au capitalisme et à toutes ces doctrines dont les cris de joie sont "individualistes, enrichissez-vous sans limite, sans regret, sans arrêt". La fonction publique doit jouer ce rôle de défenseur des valeurs humaines contre les forces brutales qui n'en ont pas.

[Nicolas Washington]

PAS (1/3) :

C’est un immense plaisir de prendre part à ce débat qui traite d’une problématique récurrente et d’actualité.

Récurrente, car notre modèle s’essouffle. Et d’actualité étant donné l’importance de nos institutions au quotidien.

Traiter ce genre de sujet n’est pas chose aisée, je ferais donc preuve d’objectivité.

Les institutions sont essentielles au bon fonctionnement de notre pays et sont la vitrine de notre nation dans le monde. Elles ont pour mission d’être utile et de fournir une valeur ajoutée à la vision que les représentants aspirent. Dans l’atteinte de ces multiples missions, une institution doit répondre à 2 prérogatives principales à savoir politiques et financières.

Ces prérogatives ternissent la réputation des organisations tant en interne, qu’en externe. Il est impératif d’en finir avec ces finalités afin de donner des objectifs précis au bon fonctionnement des institutions. A présent, elles doivent s’appuyer sur une chaîne de valeurs et la prise en compte de l’intérêt général.

Rythmées par l’orthodoxie budgétaire, nos fonctionnaires sont incapables de travailler correctement. Oui pour la performance, mais aussi pour la qualité. D’ailleurs, il faut une nouvelle ambition qui réconcilie le service public et la fonction publique. Ce sont deux termes complémentaires qui ces dernières années ont fait l’objet d’une remise en question.

Avant de parler des enjeux de nos institutions, il faut à nouveau assurer la viabilité et la fiabilité de leur action. Bien sûr, l’objectif étant d’orienter au mieux et de manière impartiale les politiques publiques.

[Karl Lacroix-Hanke]

ADF (1/3) :

Bonjour,

Je trouve dommage que dès ses premiers mots, Monsieur Bournay tombe dans la caricature et ramène le rôle de la fonction publique à celui de glaive contre le capitalisme. Je crois qu'il faut arrêter, à un moment donné, de faire des raccourcis simplistes.

Gabriel von Bertha avait porté une réforme sur laquelle la gauche n'est pas complètement revenu d'ailleurs. Certes, la loi de programmation des fonctionnaires qui prévoyait un allègement modéré des effectifs a été abrogée, mais le statut de fonctionnaire n'a pas été rétabli.

La réalité, c'est que nous avons parfois, dans certains secteurs, trop de fonctionnaires et dans d'autres pas assez. Comment faire pour régler cela sans augmenter le coût pour le contribuable ? C'est impossible. Parce qu'un fonctionnaire occupe son poste à vie. L'état est bien le seul à agir ainsi. Partout ailleurs, il existe la possibilité de moduler et d'adapter les effectifs en fonction de la demande.

Pour moi, le principal objectif de la fonction publique c'est d'être efficace. Et elle ne peut l'être sans que nous lui en donnions les moyens. D'un point de vue humain, comme d'un point de vue comptable, laisser faire une situation où le travail manque et où les gens se tournent les pouces, je considère que c'est inacceptable. Nous faisons perdre la motivation aux gens, mais aussi nous laissons la facture aux contribuables.

Certaines missions de service public peuvent être laissées à des entreprises, je pense au service postal. C'est sain, parce que d'une part, ça écarte l'état de tout ingérence, mais c'est aussi efficace.

[Jean Bournay]

FCF - 2/3

Je pense également qu'il y a un problème dans la répartition des fonctionnaires. J'en trouve trop chez les militaires et trop peu dans le social et l'éducation par exemple. Cependant, je ne crois pas comme vous l'imaginez, M.Lacroix-Hanke, que la fonction publique doit être "efficace" comme vous l'entendez.

La fonction publique ne doit pas être un simulacre d'entreprise compétitive et ne doit pas laisser ses missions tomber dans les mains du capitalisme. La fonction publique doit tenir au dessus des flots capitalistes, les missions essentielles : l'éducation, la santé, la mobilité commune, l'énergie, l'accès à l'eau, des services de communication, des télés, des radios.... Bref elle doit tenir loin de la recherche de profit, ce qui n'a pas de prix, donc ce qui a de la valeur.

Contrairement à ce que vous nous faîtes croire, on ne peut pas faire mieux avec moins, et croyez-vous vraiment que d'entreprises privées dont la seule subsistance tient au profit, à la marge et à la rentabilisation maximale, on puisse s'attendre à voir fleurir plus de prodigalité que d'un service public dont le seul but est de servir ?

Là où nous nous retrouvons cependant c'est sûr les moyens qu'il faut allouer aux services publics. Il en faut plus, bien plus. Pour offrir des services efficaces, pour offrir des services adaptés à la réalité de nos provinces et de nos milliers de villes, il faut un service public fort et entretenu.

M.Washington, je suis en désaccord profond avec la prétendue impartialité de la fonction publique. Donner à tous la même éducation est un parti pris social. Ce qu'il faut en vérité, c'est une fonction publique équitable.

[Nicolas Washington]

PAS (2/3) :

Justement, pour proposer une fonction publique équitable, elle doit répondre à une mission publique impartiale.

La question des objectifs de la fonction publique devrait déjà avoir sa réponse. Le but de ce débat est de permettre aux concitoyens de juger quelle force politique arrivera enfin à un accord commun.

De cet accord dépend le fonctionnement de nos institutions et la place que la fonction publique occupera à l’avenir. Une fonction publique tiraillée par différents courants politiques croyant bien faire.

Nous sommes face à un clivage politique qui gangrène et retarde l’évolution sereine de la fonction publique de notre pays. Ce clivage ne devrait pas exister. Dés lors, nous sommes en face d’un millefeuille administratif qui ne régit plus rien.

Pour ne rien arranger, le secteur privé vient mettre son nez là-dedans ou du moins le politique l’a incité à le faire. Pour redonner un second souffle à notre pays, il va falloir apprendre à segmenter. J’entends par là, que le secteur public n’a pas tout le temps pour vocation à passer sur pavillon privé. Que fait-on de l’intérêt général ?

La fonction publique est un atout primordial pour nos concitoyens et notre pays. Elle devrait à mon sens être considérée comme une composante essentielle du secteur pluriel. Nos concitoyens devraient avoir ce mérite.

[Karl Lacroix-Hanke]

ADF (2/3) :

Le problème, Monsieur Bournay, ce que nous ne sommes pas dans une utopie. L'état n'a pas un budget extensible à l'infini, parce que le budget de l'état, ce sont les contribuables et qu'à un moment, on ne peut pas être sur tous les fronts, assurer l'égalité des chances en milieu scolaire, une bonne couverture santé, le maintien des prérogatives régaliennes et j'en passe.

Il y a des domaines où l'état peut être un complément au privé ou vice-versa, peu importe.
Les transports, par exemple. Le fait d'avoir des sociétés de transport du privé, peut amener à baisser les prix pour les usagers.
L'énergie, l'accès à l'eau, les télécoms, les télés et les radios comme vous dites, il est intéressant d'avoir une pluralité là-dessus, pour faire jouer une concurrence saine.

Ai-je dit qu'il fallait tout privatiser ? Non.
Par contre, je le dis, nous avons besoin de souplesse pour que la fonction publique rende vraiment service.
En tant que Maire de Vauxin j'ai hélas, souvent, des plaintes qui sont déposées à l'hôtel de ville pour des services publics qui sont jugés défaillants.
La réalité, c'est que la fonction publique n'est pas adaptée à la réalité et au quotidien des gens. Il faut gagner en souplesse pour gagner en efficacité.

Parce que si la population ne constate pas que ça rend service, et de façon convenable, justement, on prend le risque d'une défiance et franchement, le quotidien de certains fonctionnaires est déjà suffisamment dur comme ça, autant ne pas en rajouter.
Et je ne serais pas défavorable à des enquêtes d'opinion ou de notation pour savoir où nous en sommes.

[Jean Bournay]

FCF - 3/3

La différence fondamentale entre les solutions proposées par l'ADF et celles proposées par le FCF réside dans la vision que nous avons. Vous pensez que le problème vient de la flexibilité. Nous croyons qu'il vient de la généralisation et du centralisme.

Je ne crois pas que la flexibilité soit le problème. Changez de professeur trois fois par mois n'améliorera pas le niveau d'éducation. Mais embauchez plus de professeurs et répartissez-les là où il n'y en a pas et vous résoudrez le problème. Je ne crois pas en un problème de forme mais en un problème de fond. Pour métaphorer, ce n'est pas le type de vis qui prose soucis mais la structure qu'on construit avec.

De même pour tous les services, il faut les déployer largement et donner plus de moyens pour s'adapter à chaque particularité. Décentraliser les services d'aides sociales et fonder des commissions locales permettra de mieux distribuer l'argent alloué aux aides sociales par exemple. De même, un service ferroviaire efficace doit être tentaculaire et bien fourni en cheminots.

Les économies ont trop souvent été réalisée par la réduction du nombre de fonctionnaires. Il fallait bien s'attendre à ce que ça rate un jour ou l'autre.

Si je suis d'accord avec vous pour la pluralité dans certains domaines, cela ne signifie pas concurrence. Pour les médias, c'est nécessaire. Pour les télécoms, beaucoup moins. Pour les énergies, ça dépend de la législation. Et pour l'accès à l'eau, c'est impensable. S'il est bien une chose que doit faire la fonction publique c'est garantir le minimum vital. En ce sens, je crois à la nécessité de mettre la distribution de l'eau et sa gratuité sous monopole public.

Merci à tous et toutes.

[Nicolas Washington]

PAS (3/3) :

Nous sommes en train de faire fausse route. La vision que chacun essaye d’imposer à l’opinion publique, la fonction publique s’en contre-fiche.Vous devez savoir faire abstraction de vos velléités politiques, elles faussent tout !

Notre fonction publique a besoin qu’on croie en ses capacités à faire évoluer notre société. Elle a besoin d’équilibre, d’unité et d’autonomie au sens propre du terme. Voilà, ce dont il lui manque pour mener à bien ses multiples missions.

A-t-elle pu jouir de toutes ces attentions à son égard jusqu’à maintenant ? Non ! Au contraire, elle est souvent galvaudée. Et malgré tout ça, nous avons une fonction publique qui fonctionne, mais ne s’épanouit pas correctement.

N’oublions pas que la fonction publique a été prévue pour répondre au besoin de nos concitoyens. Partager le gâteau en espérant que son coût soit moins onéreux pour l’Etat est une finalité criminelle… Certes, la fonction publique dans certains cas n’est plus à même de bien répondre à certains besoins, mais ça ne doit sûrement pas devenir une généralité.

Pour conclure, nous devons donner un objectif clair à notre fonction publique. Une réforme de fond doit être menée de concert avec la population, car en réalité, elle est la seule partie prenante qui peut évaluer l’action publique.

Pour redonner à la fonction publique ces lettres de noblesse, il va falloir être plus pragmatique et arrêter ces politiques spéculatives qui ne font que creuser les caisses de l’Etat et scléroser notre fonction publique.

Merci à tous

[Karl Lacroix-Hanke]

ADF (3/3) :

Je pense que ce débat a été constructif, pour nos citoyens. Il a permis de mettre en lumière que nous sommes quand même tous attachés, autour de cette table à la fonction publique. Nous sommes d'accord pour dire qu'elle a une utilité et qu'elle assure le service public auprès de tous.

Là où nous divergeons, c'est dans le diagnostic actuel et dans les réponses que nous voulons apporter.

L'ADF n'est pas partisane de l'immobilisme que vous proposez, Monsieur Washington. Parce que tout ne va pas bien. Nous avons des secteurs en sureffectif et d'autres en sous-effectif. Ne pas y apporter une réponse, faire l'autruche, reviendrait à laisser le problème se gangréner.

Pour répondre à M. Bournay, je suis persuadé que la centralisation est pourtant la meilleure façon de coordonner les services publics. Pour faire un parallèle, c'est comme si vous preniez l'impact du réchauffement climatique sur notre seul pays. Vous vous direz "grosse annonce pour petits résultats". Reculez, pour avoir une vision d'ensemble, régionale, puis mondiale et là, votre discours deviendra "catastrophe en vue".

C'est pareil pour nos services publics. L'état ne peut pas rendre service que locale. Il lui faut une vision d'ensemble, qui permette une réponse efficace. Et cette réponse efficace ne peut se faire que si la fonction publique est flexible, si elle est équilibrée et si elle a préservé la confiance avec nos citoyens. C'est l'action que nous avons menée quand nous étions aux responsabilités et qu'il faut poursuivre, activement.

Je vous remercie pour ces échanges très agréables ! Bonsoir.