Résidence de la famille Citron

[Julien Citron]

La famille Citron disposait d'une résidence familiale à Etchegorda depuis quelques générations. Les grands travaux de rénovation récents en avait fait un petit paradis perdu dans la banlieue d'Etchegorda. Julien était fier de sa maison qui mêlait modernité et tradition.






Il songeait même à vendre son appartement d'Anglès et à s'installer définitivement en Catalogne.

[Julien Citron]

Un texto arriva sur le téléphone portable de Thomas:

[Thomas Citron]

Tandis que la voiture de fonction de son père regagnait le domicile, le silence se faisait pesant. Son père s'occupait de répondre à des textos tout en le regardant du coin de l’œil. Soudain il le tendit sous ses yeux.

4 blessés légers ? s'étrangla le jeune garçon.

Son père ne fit aucun commentaire mais lui adressa un regard qui lui fit comprendre que tout cela c'était de sa faute.

Je ne voulais pas...

Mais tu as quoi dans la tête ? Tu as mis tous ces jeunes en danger et tu avais la belle place ! Si le Gouverneur veut te poursuivre en justice je ne pourrais rien faire, tu entends ? Tu t'es mis dans une sacré merde alors maintenant assume !

Thomas regarda son père avec les larmes aux yeux. Julien reprit un air plus apaisé.

Tu n'as pas besoin de jouer au jeune révolutionnaire, Thomas. Tes résultats sont exceptionnels, tu as une copine et tu passe le BNES l'année prochaine ! Ne fous pas ton avenir en l'air et redescend sur terre. Je sais que je ne suis pas souvent là à cause de mes responsabilités mais si je suis intervenu directement c'est avant tout pour éviter d'aggraver ton cas. Promets-moi de ne jamais recommencer ! Ah et tu n'ira pas à la réunion d'urgence, tu as fait assez de dégâts comme ça.

Thomas s'en fichait, après tout son père lui avait évité bien des ennuis. Il s'approcha de son père et l'enlaça.

Je te le promet.

[Julien Citron]

Julien avait pris un week-end chez lui auprès de sa femme et de sa fille. Une petite coupure était nécessaire car il manquait de repos.
Alors qu'il était en train de regarder la télé avec Liliane son portable professionnel sonna. Il s'agissait de son conseiller en communication qui appelait seulement en cas d'urgence. Tout de suite il comprenait que l'entretien n'allait pas être agréable.

Monsieur le ministre ? Je vous appelle parce que mes canaux d'information ont eu vent d'une colère de Mme Lacroix-Valmont lors d'une réunion ministérielle en raison de vos propos sur l'espace Schengen. Elle vous accuserait d'outrepasser vos fonctions et de la mettre dans l'embarras. D'ailleurs elle s'oppose totalement à cette idée. Je ne vous cache pas non plus que la Chancelière s'alignera sur Lacroix-Valmont.
Quant à moi je reste sceptique sur votre méthode sur ce dossier.

Julien garda le silence un moment, il réfléchissait. Il ne se sentait nullement coupable dans cette affaire.

Vous savez, j'ai du respect pour Aurore qui est une grande femme politique mais j'en ai encore plus pour moi.
Je ne compte pas me taire à ce sujet. Constatez déjà que le débat commence à s'installer dans l'opinion. Ce débat me semble nécessaire et nous l'aurons.
Cependant je respecterai les prérogatives de chacun et n'évoquerait plus ce sujet dans le cadre officiel. En revanche vous allez me programmer une conférence à l'Université d'Aspen sur l'adhésion à l'espace Schengen où j'interviendrai en vertu de mon statut d'enseignant-chercheur en Histoire. Touchons la jeunesse d'abord, je ne cédérai aucun micromètre et si on parvient à me priver de ma parole je quitte le gouvernement et soutiens ouvertement Victor Karlsson à la Chancellerie pour les prochaines élections qui ne sont plus très loin. Ah et important, cette confrontation doit rester privée et courtoise.

Le conseiller semblait plutôt convaincu par l'exposé de son ministre. Il raccrocha. Sa femme l'interrogea sur la situation.

Prépare-toi chérie, ça risque de souffler très fort au gouvernement.

[Julien Citron]

Après la passation de pouvoir avec Léna Voligni, Julien prit la direction de la gare pour prendre un train en direction d'Etchegorda. Il était amer de la défaite à quelques milliers de voix près. Il repensa à son mandat de ministre de l'économie et à toutes les difficultés qu'il avait traversé.
Sa femme était à ses côtés et depuis quelque temps il avait réussi à retrouver de la complicité avec elle. La période de crise était terminée.

-Ah Liliane, je me sens libéré ! Je vais enfin pouvoir me consacrer à Etchegorda à plein temps.

Sa femme le regarda avec amoureusement les yeux pétillants.

-J'ai vraiment admiré ton courage Julien, tu as réussi à tenir avec toute cette pression. Tu es mon héros.

Elle gloussa et déposa un baiser sur ses lèvres. Julien éclata de rire.
Une page se tournait mais il ne comptait certainement pas raccrocher. Le parti avait besoin de lui et il comptait rester présent.
Il avait été ragaillardi par sa réélection avec 39% et sa motivation était revenue. Avec ce qu'il venait de vivre, il ne devait de compte à personne et il ne se priverait pas de faire entendre sa voix quand il le faudrait.

-Dis-moi chéri, tu vas viser la tête du parti ?

-Non. J'ai clairement autre chose à faire et c'est Etchegorda qui compte cette fois-ci. J'ai beaucoup donné de ma personne pour mon parti mais je n'ai aucune envie de le diriger. Il y a aussi la famille. Thomas va bientôt revenir à la maison et j'ai tellement de choses à rattraper avec lui, si seulement tu savais... Je pense que la défaite sera amère longtemps. Lubenac est arrivé de nulle part et nous a coiffé au poteau. Par contre ils m'entendront à l'Assemblée Fédérale, crois-moi ! Surtout que le bruit court que le nouveau gouvernement va abroger mes lois. Ah ça, je ne laisserai pas passer !

La voiture arrivait enfin à la gare. Julien et sa femme se dirigèrent vers les quais. L'ancien ministre jeta un oeil autour de lui, quelle satisfaction d'enfin quitter Aspen plus de trois jours et d'aller prendre un repos bien mérité !

[Julien Citron]

Julien était en train de jouer au scrabble avec sa femme. Ces derniers mois avaient été une bénédiction car il était reposé et d'attaque pour un nouveau mandat à la tête de sa ville.
Il avait renoué avec son fils Thomas qui était aujourd'hui dans l'armée et très distingué sur l'Île de Norijo auprès du Marquis.
Julien avait pris en maturité et n'était plus le jeune homme provocateur qui faisait parler. Âgé maintenant de 40 ans il avait pris de la stature et se sentait prêt pour toute éventualité.
Il était en quelque sorte dans une retraite politique provisoire mais il se préparait à en sortir à tous les instants.

Confiture, mot compte triple. Il empocha ses points en riant devant la mine déconfite de sa femme. Mais un SMS lui parvint immédiatement après. Il le lut.

Oh mon dieu ! Il l'a enfin fait. Il resta assis tandis qu'il avait le palpitant. Chérie on fait les valises ce soir, je reprend du service...

[Maître du Jeu]

Dans la nuit, un individu cagoulé fit irruption dans la propriété des Citron. Il accrocha une affiche "Refugees not welcome" sur la porte de la demeure, à l'aide d'un couteau de boucher plein de jus de betterave qu'il enfonça profondément dans le bois de la port. Puis il prit la fuite.

[Julien Citron]

En réponse à cette provocation, le maire organisa un concours pour une banderole en faveur de l'accueil des migrants. Lorsque la plus belle banderole fut élue, on la fit accrocher sur la façade de la mairie.

[Alain Chouillard]

Ayant eu vent des actions policières illicites commanditées par Julien Citron sur la Zone Autogérée de Salusa Est, Alain envoya une dizaine de ses militants de Catalogne, vêtus de noir et cagoulés, pour mener une expédition punitive sur le domicile des Citron.

Vers 3H00 du matin, les individus pénétrèrent dans le jardin de la propriété et aspergèrent les voitures de Citron et de sa femme d'essence. Ils partirent en incendiant chacune d'elle au Zippo. Le portail d'entrée fut également tagué avec la mention suivante : "À bas l'État, les flics et Citron". Ils partirent ensuite aussi vite qu'ils étaient arrivés.