Monsieur le Président de l'Assemblée Fédérale,
Monsieur le Ministre Fédéral,
Mesdames et messieurs les Députés Fédéraux,
Monsieur le député De Salvo,
Je vais passer rapidement sur vos affirmations un brin trop simplistes. Peut-être que vous pouvez vous faire berner par un individu qui simule une dépression. Mais ce n'est pas le cas d'un psychiatre.
Et quand bien même, je tiens à rappeler que le traitement de troubles dépressifs sévères peut aller jusqu'à un internement en service psychiatrique. Qui pensez-vous serait assez inconscient pour risquer de finir en service psychiatrique pour le simple plaisir de ne pas aller travailler ? Croyez-vous les travailleurs à ce point superficiels ?
Nos projets viennent combler le vide de protection sociale que votre gouvernement provincial (entre autre) s'est refusé à combler et qui rend probable de nouvelles tragédies comme celles que nous avons déjà connus. Appelez-ça récupération si vous voulez, pour moi, ces malheurs sont au moins un prétexte pour prendre conscience de la nécessité d'agir pour qu'ils ne se reproduisent plus.
Madame la député Flechmann,
Je vais tâché d'expliquer au mieux et de la façon la plus complète qui soit, car vous semblez avoir quelques lacunes sur le sujet.
Premièrement, non, la dépression n'est pas le burn-out et le burn-out n'est pas la dépression. Réduire l'un à l'autre est incohérent. Il n'y a pas besoin d'avoir un doctorat en psychiatrie pour le savoir.
Dès qu'on admet qu'on parle de troubles dépressifs et non d'épuisement, en l'espèce donc, votre amendement est contraire à l'article 44 de la Constitution qui stipule qu'un article de loi qui n'a aucun rapport avec l'objectif prononcé de la loi est susceptible d'être frappé d'invalidité.
C'est très simple, dépression et épuisement ne sont pas des synonymes. Quand on parle de dépression au travail, on ne parle pas des questions d'épuisement, de pressions - j'y reviendrais plus tard - mais d'abord de situations de travail, d'un environnement ou de conditions difficiles qui peuvent conduire à des troubles dépressifs.
Parlons donc des professions les plus exposées aux cas de dépression liés au travail. C'est le cas des pompiers, des policiers, des urgentistes, des infirmiers, des gardiens de prisons, des travailleurs sociaux, des psychiatres... Autant de professions essentielles au fonctionnement de notre société, mais qui impliquent pour ceux qui les exercent de se confronter parfois à des situations terribles, face à des horreurs, à la souffrance humaine et à la mort. Et ces travailleurs ne sont pas des sur-hommes et sont autant exposés que chacun de nous aux risques qu'il y a pour l'esprit à rencontrer quotidiennement ce genre de situations.
Je suis conscient du tabou qu'il y a autour de cette réalité mais je refuse de m'en servir comme prétexte pour refuser l'action.
Pour prendre un exemple parlant : avec la création prochaine de la FAP, unité de la police fédérale chargée de lutter contre les réseaux pédocriminels, des policiers très formés seront en charge de lutter en permanence contre la diffusion de contenus pédophiles. Et ces policiers seront probablement plus exposés aux troubles dépressifs que d'autres fonctionnaires. Pas en raison d'une surcharge de travail ou de contraintes de leur hiérarchie, comme ça serait le cas pour l'épuisement professionnel, mais à cause du fait de devoir combattre au quotidien la propagation de contenus monstrueux. A cause du fait d'assister à des scènes terribles, dangereuses pour la santé de l'esprit de chacun, au quotidien, à son travail.
Offrir donc un soutien à ces travailleurs, et en général à tout ceux dont le travail conduit à rencontrer des situations difficiles et très impactantes, c'est une autre problématique que celle d'offrir le soutien adéquat aux victimes d'épuisement professionnel - mais l'une ne va pas sans l'autre. Reconnaître le burn-out et ne pas reconnaître la dépression lié à l'environnement de travail, c'est ne laisser disposer les travailleurs que d'une protection bien incomplète face aux aléas de leur métier.
Et je tiens à dissiper l'amalgame étrange qui est né au cours de ce débat, selon lequel une dépression serait forcément lié au travail. Non, personne ne dit ça. Car il existe 1001 facteurs pouvant conduire à une dépression. Mais lorsque ce facteur est la situation au travail, la moindre des choses, c'est de le reconnaître.
Je propose donc l'amendement suivant afin de clarifier le projet et de mettre un terme à l'énormité que j'ai entendu tout à l'heure :
Proposition d'amendement n°1 - GOUVERNEMENT FÉDÉRAL
L'article XXX ci-après :
Article Unique -
La dépression est reconnue comme maladie professionnelle. En cas de diagnostic de dépression par un professionnel de santé, un congé payé de 3 semaines est accordé au patient, s'ajoute à cela 2 semaines de congé payé supplémentaires par an. Ce régime spécial ne peut faire l'objet d'une stigmatisation ou d'une baisse de salaire.
Cette loi ne saurait prévaloir à une législation provinciale.
Est ainsi modifié :
Article Unique -
Les cas de dépression liés à l'environnement, aux conditions ou à la situation de travail sont reconnus au titre de maladie professionnelle. En cas de diagnostic de troubles dépressifs liés à l'environnement ou à la situation de travail par un professionnel de santé, un congé payé de 3 semaines est accordé au patient, s'ajoute à cela 2 semaines de congé payé supplémentaires par an. Ce régime spécial ne peut faire l'objet d'une stigmatisation ou d'une baisse de salaire.
Cette loi ne saurait prévaloir à une législation provinciale.
Et comme dit par le Ministre Fédéral, le projet visant à la reconnaissance spécifique de l'épuisement professionnel est à l'étude et sera soumis à l'Assemblée Fédérale dès la prochaine session.